Dans le désert, l’espoir et la radicalité

<strong>Dans le désert, l’espoir et la radicalité<strong>

La pièce Dans le désert, l’espoir associe le théâtre, la performance, la danse, le cinéma, la musique afin d’accompagner la lecture de textes éloquents. En effet, ce spectacle découle d’une rencontre entre le philosophe Benoît Bohy-Bunel avec la comédienne Roxane Borgna. L’occasion d’un atelier à partir du livre Symptômes contemporains du capitalisme spectaculaire avec cette rencontre entre deux univers : « Cette pièce permet une mise en théâtre de la théorie critique. Tu ne fais pas une conférence, tu la performes. Ça lui donne un nouveau sens« , présente le philosophe. Par exemple, se produit sous nos yeux une danse allégorique sur la désolation de Benoît Bohy-Bunel.

La mise en scène permet de donner une autre perspective à ce texte, une autre ampleur : « Cet état de transe sublime le texte« , précise Benoît Bohy-Bunel. Plus loin, les danseurs se mettent des claques. Ensuite, une circassienne se tient en équilibre pour incarner un texte critique sur Facebook. L’éventail est large.

Le choix des textes puise dans le courant de la critique de la valeur qui remet en cause toutes les catégories du capital : argent, travail, marchandises. Une critique implacable de l’emprise de la logique capitaliste se déploie. Mais les lectures ne se cantonnent pas uniquement à un regard pessimiste et négatif puisqu’est abordé un texte d’Hannah Arendt, évoquant le miracle et l’espoir. Un autre de Simone Weil revient sur La personne et le sacré. Des citations d’Edgar Morin reviennent sur le quantitatif, le qualitatif et « la part gratuite de l’existence ». Un florilège bien choisi.

La force du spectacle réside dans son refus de se complaire dans le pessimisme et la résignation. La liste des pays qui ont été secoués par des révoltes sociales depuis 2019 est énumérée, comme propension à l’action. « La révolution devient plus impérieuse à cause de la situation désertique« , insiste Benoît Bohy-Bunel. Le philosophe propose une société sans oppression. « Une société dans laquelle une personne en situation de handicap peut vivre sans souffrance« , précise Benoît Bohy-Bunel.

Voir des acteurs et actrices sur scène attaquer le travail et le capitalisme apparaît comme un spectacle déroutant. Il est possible d’y voir une critique du théâtre, ou alors une récupération spectaculaire-marchande de la théorie critique. « Avec Roxanne, nous avons conscience de la contradiction entre le théâtre et la critique de la marchandise« , confie Benoît Bohy-Bunel.

Ce dernier reste critique à l’égard de l’industrie culturelle et de la société de consommation. Le philosophe remet même en cause l’élitisme de la théorie critique qui s’adresse à un public réduit, doté de références culturelles et d’une bonne disposition à la réflexion. « Si tu n’es pas conscient de ça, alors tu es dans la contradiction« , pointe Benoît Bohy-Bunel.


Néanmoins, la lecture et la mise en scène permettent de rendre les textes plus accessibles. Le découpage du texte favorisant sa compréhension. Les visages peints en rouge et noir évoquent les idées communistes libertaires pour dessiner une perspective politique. Cette pièce tient à se démarquer de la provocation facile et du scandale subventionné qui prédomine dans le théâtre contemporain. Des spectacles élitistes qui se moquent des spectacles destinés aux spectateurs des classes sociales les plus pauvres. Ici, au contraire, la mise en scène s’accompagne de textes qui affichent clairement une radicalité politique.



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