School of Moon ou la possibilité d’un après

School of Moon ou la possibilité d’un après

 

Et si la vie, toute entière, était unifiée par l’enfance ? C’est le postulat qui se fait jour devant School of Moon d’Eric Minh Cuong Castaing. Dans cette pièce pour deux danseurs, des enfants et des robots, le mouvement se développe avec une grâce certaine et du sens.

Dans l’esthétique épurée, minimaliste, d’un plateau livré aux corps minuscules, chaque gramme, chaque centimètre carré d’enveloppe corporelle devient visible. Sous la lumière diaphane et lunaire, la scénographie privilégie le même traitement des êtres animés par diodes ou capillaires. Dans cet espace hors du temps, semblable à un chapitre de roman d’anticipation, enfants et robots apprennent ensemble la mimesis. Pas comme contemplation idiote, mais imitation poétique, motivée par la volonté intrinsèquement humaine, si chère à Aristote, de tendre vers une fin signifiante. Toute la beauté de School of Moon résidant dans sa faculté à devenir tel un enfant, par delà les contours morphologiques.

Porté par un travail sonore remarquable et un choeur éclaté d’enfants silencieux, la création donnée dans le grand studio du Ballet National de Marseille révèle un monde intérieur entre le songe et l’éveil, dont la grâce se situe entre l’éphémère et l’ancrage mémoriel. Devenir tel un enfant, c’est là tout l’enjeu. La quête d’altérité entre humains et robots se pare de gestes archaïques, de balanciers instinctifs et finalement universels. Diluant, touche par touche, les nuances de ce lavis ancestral et sensible, Eric Minh Cuong Castaing restitue un univers mélancolique, empreint de candeur et de gravité.

Outre la présence délicate d’Ana Pi, la troublante apparition d’un chérubin portant les peintures de guerre d’un écorché rappelle à la fois la Renaissance et les coloriages enfantins. Mercenaire ou oeuvre anatomique ambulante, le garçonnet porte à bout de bras un robot articulé comme victime ou protégé, alors que les danseuses montent sur demi-pointes armes à la main. Scène spectrale mêlant souvenirs et augures, School of Moon explore les abysses d’un futur de chair et plastique comme on lit une épitaphe: en acceptant le passage à l’ère d’après.



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